« Les élus cumulards s’expliquent » titrait L’Indépendant, lundi 16 septembre. Même L’Indép si met ! Le sujet est devenu incontournable ! Il s’est imposé en quelques années dans le débat public. Aucune autre mesure du programme de Hollande ne recueillait un tel soutien, ne suscitait une attente aussi forte de l’opinion publique. Il n’était plus possible de reculer. Et pourtant la quasi-totalité de la droite et un bon nombre d’élus du PS s’y sont farouchement opposés. Ils ont gagné quelques années. Mais en donnant ce spectacle pitoyable, il n’y a pas d’autre mot, d’une caste défendant ses privilèges. Les Français ont massivement perçu leur comportement comme tel. A-t-on déjà entendu nos concitoyens, de toutes catégories sociales, de tous âges, parler aussi mal des politiques ?
Il y a, dans l’intéressant papier signé Jérémy Fahner, quelques perles qui valent d’être relevées. C’est Bourquin déclarant : « Je donne ma vie à la politique ». Comment un homme politique peut-il encore, à notre époque, vouloir faire croire qu’il est dévoué corps et âme au bien public ? Plus personne ne croit à cette mythologie sacrificielle. Sa passion à Bourquin, c’est le pouvoir et contrairement à ce qu’il proclame trop fort pour que ce soit vrai, il n’est probablement pas indifférent à l’argent.
L’humanité aura fait un immense pas en avant quand elle sera parvenue à contrôler, avec des règles, l’envie des hommes de dominer leurs semblables avec le pouvoir et aussi avec l’argent.
Le génie de Millas se présente souvent comme un curé de la politique. Mais un curé, même un évêque, sait-il ce que sa touche à la fin du mois ? L’un comme l’autre autour de 1 000 €. Plus quelques avantages et défraiements beaucoup moins généreux que ceux que s’attribuent nos chers élus.
La question du journaliste de L’Indép a énervé Hermeline Malherbe. Pour elle, le dossier de L’Express sur le cumul est une incitation à voter Front National. Voilà une bonne méthode pour combattre le FN. Passer sous silence tous les sujets qu’il pourrait exploiter. Ce n’est pas le cumul des postes, des indemnités et des privilèges qui pose problème. Le problème c’est que ça se sache.
Dans une réaction qui fait suite à l’article de L’Indep, Jean-Paul Alduy déclare : « Je considère en toute conscience que le cumul des mandats est la principale cause de notre incapacité à réformer nos institutions. » Voilà une prise de conscience bien tardive. Entre 2001 et 2009, il a cumulé, la mairie de Perpignan, la présidence de l’agglo et le sénat. Il a certes en 2001 échangé le poste de maire contre celui de premier adjoint. Et s’il n’avait pas été battu, aux élections sénatoriales de 2011, par une coalition Bourquin-Calvet, il siègerait encore au Palais du Luxembourg où il était peu actif. Même avec les importantes ressources intellectuelles d’un Alduy, le cumul c’est l’inefficacité.
Et voilà que Daniel Mach arrive dans le débat. Grand moment. Nous ne résistons pas au plaisir de reproduire l’intégralité du communiqué qu’il a envoyé à la presse après l’article de L’Indép. Un chef d’œuvre de légèreté. Dans tous les sens du terme !
« En réponse aux propos tenus sur le non-cumul des mandats
Prochainement, le projet de loi sur le non-cumul des mandats va être débattu au Sénat.
Il semblerait qu’à l’heure actuelle il soit de bon ton d’exprimer son opposition au cumul des mandats et je me sens obligé de réagir à certains propos démagogues, tenus ces derniers jours, dans l’Indépendant.
La position de la majorité des parlementaires UMP, qui est aussi la mienne et que j’assume depuis très longtemps, est de dire qu’un mandat exécutif local et un mandat national ne sont pas incompatibles. Bien au contraire, je dirais même qu’ils sont complémentaires. Pour les élus, l’important n’est pas de cumuler les pouvoirs, pire les indemnités, mais de cumuler l’efficacité.
Député-maire ou sénateur-maire sont les mandats idéaux pour ne pas rompre le cordon ombilical entre les élus et leurs concitoyens.
Cette complémentarité de mandats permet à l’élu de rester connecté aux réalités de terrain, d’être au plus près des préoccupations et attentes de ses concitoyens qu’il relaye toutes les semaines au Parlement.
Je fais partie de ceux qui contestent régulièrement le parisianisme et, pour conserver cette logique, je me bats pour que le lien entre les territoires, les administrés et le pouvoir central ne soit jamais rompu. »
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Ce n’est que caricature. Car, dans la loi, il est uniquement prévu d’interdire de cumuler un mandat de parlementaire avec un mandat exécutif, (maire, président d’agglo, de département, de région). Un parlementaire pourra toujours être conseiller municipal de sa ville ou de son village, conseiller d’agglo ou d’une communauté de communes, conseiller général ou conseiller régional. Où est le risque de couper le député et le sénateur du lien avec le citoyen ? Il n’existe pas.
« Cumuler l’efficacité » ? Daniel Mach ne doit pas parler pour lui. Toujours mal classé par les différents palmarès sur l’activité des députés, en 2010, lesinfos.com le plaçait à la 534 ième place sur 575.
La démocratisation de nos institutions locales et nationales, la moralisation de la vie politique sont devenus des sujets incontournables du débat politique. Aucune avancée démocratique, nulle part, dans aucune période, n’est arrivée toute seule. Les privilégiés ne veulent jamais renoncer à leurs privilèges. C’est un combat. Un combat d’autant plus essentiel qu’il redonne foi dans la démocratie et dans la participation citoyenne pour améliorer la société. Notre pays a besoin de retrouver ses idéaux et ses valeurs fondamentales, la démocratie et la République. Des valeurs indispensables pour retisser un lien social et civique qui se désagrège et laisse triompher toutes les formes d’égoïsme du bas en haut de la société. Des valeurs essentielles pour résister à la progression d’un Front National qui fait en grande partie son lit sur le rejet de la classe politique. F.T.
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