Dans un peu plus de six mois les Perpignanais, comme tous les Français, seront invités à élire un nouveau conseil municipal. Il y a pour l’instant trois prétendants sérieux. Tout d’abord, bien sûr, le maire sortant Jean-Marc Pujol indissociablement lié à Jean-Paul Alduy, son premier-adjoint qui entend conserver la présidence de l’agglomération Perpignan-Méditerranée. Puis dans l’ordre alphabétique, Louis Aliot, le candidat du Front National, et Jacques Cresta, tête de liste du Parti Socialiste. On parle aussi bien sûr beaucoup d’une deuxième liste de gauche qui serait conduite par Jacqueline Amiel-Donat ou par Jean Codognès.
Le tandem Pujol-Alduy n’aura pas la tâche facile. Considérant qu’ils peuvent gagner la ville, Frontistes et Bourquinistes ne vont pas faire de la figuration. Ils vont taper dur. Ce qu’ils savent faire. Et ils ne manqueront pas de ressource. Pour ne pas être éliminée au premier tour, une liste doit dépasser 10% des suffrages exprimés. Ce qui signifie qu’il y aura au minimum trois listes au second tour.
Aux municipales de 2009, Louis Aliot n’a pas dépassé la barre des 10%. Cinq ans plus tard, personne ne serait étonné que le compagnon de Marine Le Pen soit à 20 % et au passage prennent de nombreuses voix à la liste de droite. La dédiabolisation est passée par là et le candidat d’extrême-droite a acquis une stature nationale grâce à ses fréquents passages dans les grands médias et localement par un solide appui rédactionnel de L’Indépendant. Louis Aliot sait que l’état de Perpignan, ville en crise dont tous les indicateurs sont au rouge, lui est favorable. Mais Louis Aliot saura t’il apparaître aux électeurs comme un homme en capacité de gérer la ville ? Louis Aliot a du punch, mais n’a t’il que ça ? Dénoncer, dénoncer, toujours dénoncer avec virulence. Bien qu’il soit intelligent, Louis Aliot a du mal à montrer un autre visage. A défaut de résider à Perpignan, il aurait pu devenir Perpignanais en acquérant une bonne connaissance des dossiers de la ville. Il n’en connait aucun. Il devait en janvier 2013 annoncer ses mesures phares pour Perpignan. Rien. Il annonçait comme certain le ralliement de personnalités locales. Flop complet. Un notable un temps courtisé par Aliot a pris ses distances en disant qu’il avait été effrayé par la médiocrité de l’entourage local du numéro 3 du FN. Souvent brut de décoffrage, Louis Aliot en a été réduit à déclarer qu’il attendait la constitution de la liste de droite pour récupérer les élus qui ne seront pas repris par Pujol et Alduy. Quel aveu d’échec.
Jacques Cresta, le factotum de Christian Bourquin est sous estimé. Pas dans ses compétences. Seulement dans sa capacité électorale. Les électeurs ne votent pas pour les compétences d’un candidat. 99% d’entre eux ne savent pas grand chose sur ceux qui sollicitent leurs suffrages. Et si l’élection était un concours d’intelligence nombreux sont ceux, à gauche comme à droite, qui n’auraient jamais du aller s’assoir sur les bancs de l’Assemblée Nationale. C’est d’ailleurs pour ça que la politique est l’activité où il y a le plus de médiocres qui prospèrent. Les infortunes de Hollande et d’Ayrault pèseront sans doute sur le scrutin municipal. Probablement pas jusqu’à provoquer un effondrement du PS. Mais le score de la liste Bourquiniste dépendra beaucoup de la campagne de la liste JAD-Codo ou Codo-JAD. Cresta sera aussi handicapé par le bilan du Bourquinisme. Le bilan de la gestion du conseil général depuis maintenant plus de 15 ans est clairement négatif. Sauf,en matière de développement du clientélisme et de sectarisme. Pas grand chose à voir avec les valeurs qui servent d’étendard à la gauche. Jacques Cresta à la mairie ? C’est possible. Ce serait la réalisation du rêve de Bourquin. Contrôler le département.
Jean-Marc Pujol, tête de liste UMP, va, à 64 ans, faire sa première campagne comme leader. Comment s’en sortira t’il ? Les campagnes électorales, la politique politicienne ce n’est pas son truc. Il va certainement en grande partie sans remettre à Michel Sitja, son directeur de cabinet qui sera son directeur de campagne. Pour l’heure Pujol et Sitja veulent avant tout rassembler leur camp le plus largement possible, catalanistes de droite et du centre compris. Jordi Véra CDC, prenant la place de Jaume Roure chef d’Unitat Catalana, micro parti organisé autour de ce dernier. Jean-Paul Alduy, depuis son élection à la mairie en 1993, il y a vingt ans, faisait rêver les Perpignanais en promettant à leur ville un grand destin lié à celui de Barcelona. Mais le verbe du grand magicien n’opère plus. La réalité s’est imposée. Ne serait-ce qu’avec la friche qu’est devenue ce Centre Del Mon qui symbolisait le Perpignan de 2020. Plus proche des réalités Jean-Marc Pujol a fait de la propreté et de la sécurité ses deux priorités. Mais les résultats ne sont pas encore à la hauteur des attentes. Il y a beaucoup de positif en matière de proximité et d’action municipale menée à partir de la création et du développement de mairies de quartier. Mais au final les difficultés d’une ville en souffrance et une certaine impuissance autant qu’un manque de moyens, comme par exemple en matière d’emploi et de sécurité, risquent de peser lourdement dans le scrutin. Les qualités de gestionnaire de Pujol, encore faut-il qu’elles soient connues, compenseront-elles son manque de charisme et d’autorité ? Le maire sortant sera fortement handicapé par les inévitables attaques contre ce système Alduy qui occupe la mairie de Perpignan depuis 1959. Plus d’un demi siècle ! Faute d’être le candidat idéal, Pujol pourrait apparaître comme le moins mauvais. Il y a en effet pire. Il est aussi pragmatique qu’Alduy est délirant et aussi ouvert que Bourquin est sectaire.
La liste Amiel-Donat Codognès pourrait se présenter comme une alternative aux deux systèmes qui ne sont pas pour rien dans la catastrophique situation économique et sociale des P-O. Mais cela ne suffira pas. Il lui faudra incarner une réelle alternative avec un vrai projet urbain. Le Parti de Gauche apportera t’il son poids électoral en participant à cette liste ou à celle des Bourquinistes ? Francis Daspe le responsable régional et perpignanais du Parti de Gauche ne s’est pas exprimé sur le sujet. Mais les dernières déclarations de Mélenchon ont montré qu’il avait au premier tour une préférence pour une alliance avec les Verts. Et les Verts, ici, c’est Codognès. Il y aura deux listes de gauche au premier tour, mais il pourrait n’en rester qu’une au second tour. C’est la logique à gauche et le score du FN pourrait imposer l’union. Surtout si celui de Louis Aliot lui entre-ouvre les portes de la mairie. Il y aura donc un match dans le mach entre les deux listes de gauche.
On peut donc parier sur une triangulaire dans laquelle chaque camp aura ses chances de l’emporter. F.T.